Dire que le temps est la plus commune des fictions peut apparaître comme une provocation. Le temps n’est-il pas ce qui rythme la vie de tout un chacun ? Si rien d’humain ne m’est étranger, n’est-ce pas parce que je partage la connaissance commune à tous les êtres humains que mon temps est compté et qu’un jour je vais mourir ? Et ma conscience du temps n’est-elle pas elle-même régulée par le temps social du groupe auquel j’appartiens ? Le temps est individuel, le temps est social, le temps est même universel puisque le Temps universel (TU) sert d’unité-étalon à tous les temps relatifs à la situation géographique d’un pays par rapport au méridien de Greenwich. Mais si le temps fait sens de toutes parts, comment alors justifier la proposition qui le réduit au statut de fiction même la plus commune ? Le propos de cet ouvrage est de montrer que si nous interrogeons les différents sens du temps, nous sommes irrésistiblement incités à affirmer qu’il n’est qu’une fiction qui « réussit », au sens où elle emporte l’adhésion du plus grand nombre, et qui constitue à tous les niveaux un instrument majeur de domination.