Quel est le lien entre immunologie et identité ? Au cœur de l’immunologie se trouvent les concepts de « soi » et de « non-soi », ainsi que ceux d’unicité et d’individualité. Les immunologistes contemporains affirment que, en se fondant sur le vocabulaire du soi et du non-soi, leur discipline apporte une réponse à la question de savoir ce qui fait l’identité d’un organisme à travers le temps. Cet ouvrage met en doute cette affirmation. S’appuyant sur des données récentes sur la tolérance immunitaire, le chimérisme ou encore la symbiose, il montre que la théorie du soi et du non-soi, qui domine l’immunologie depuis plus de cinquante ans, n’est plus adéquate. Il propose une autre théorie, la théorie de la continuité, dont l’un des objectifs est de rendre compte des nombreux cas dans lesquels un organisme tolère des entités étrangères, en particulier des bactéries. L’organisme doit alors être compris selon une perspective écologique : il est ouvert à l’extériorité, à l’autre, et en grande partie constitué par l’appropriation d’entités initialement « étrangères ». L’immunologie donne bien une définition de l’identité biologique, mais celle-ci est aux antipodes de la conception selon laquelle l’organisme serait une réalité fermée, définie de façon endogène et défendant son intégrité contre tout « non-soi ».Thomas Pradeu est Maître de conférences à l’Université Paris-Sorbonne. Son domaine de recherche est la philosophie de la biologie.