L'hôtel d'Anamorphose, naguère somptueux, niché dans la montagne, offre toujours une vue admirable sur l'Adriatique. Mais le voyageur, qui a conservé le souvenir d'un luxe raffiné et d'une brillante compagnie, ne trouvera que les témoignages d'un lent délabrement dans une maison désertée. Désertée ? – pas tout à fait, sinon il n'y aurait pas d'histoire. Cet hôtel où il faut se méfier des miroirs n'est qu'un exemple parmi tant d'autres d'un art raffiné où se marient le rêve et le fantastique, où de subtils glissements nous font passer de l'enchantement à l'angoisse. Ainsi, dans Hodie..., l'agitation d'une gigantesque opération de police empêche presque de voir, dans un coin du tableau, une nativité, la crèche. On pense à Pieter Bruegel le Vieux et à son tableau Le dénombrement de Bethléem. Le foisonnement des personnages ne figure-t-il pas notre conscience dispersée, alors que passe sur son âne la promesse du salut? Cependant, avant d'être œuvre de pensée, la composition de Bruegel n'est-elle pas d'abord œuvre à voir ? Autant de clés que de regards. Tout manuscrit est inachevé, puisqu'il invite le lecteur à jouer à son tour, puisqu'il éveille en chacun des prolongements infinis.