La coutume d'imprimer, sur la couverture de chaque livre, le résumé de son contenu, a très vite engendré une seconde habitude, celle de se contenter de ce résumé, au lieu de « se taper » l'ouvrage. C'est à quoi, maint critique - et sans doute maint « lecteur » - durent l'avantage de pouvoir se tenir au courant de tout ce qui sortait de presse. Je ne saurais dire s'il en est résulté des conséquences bénéfiques ou fâcheuses. Or, un autre aspect de la question n'est pas moins remarquable. C'est que l'on a imaginé de demander, à l'auteur lui-même, la confection de cette notice, bref de se faire son propre porte-parole. Voilà qui était, sinon sage, idoine et des plus rassurants. Qui, mieux que lui, parlerait de son œuvre ? Ce n'est peut-être pas sûr. Car l'auteur, faute de pouvoir dire - en deux mots - ce qui lui avait coûté deux cents pages, se trouva placé devant deux solutions contradictoires. Faire son propre éloge, n'était-ce pas se mêler de ce qui ne le regardait pas ? Et comme il ne pouvait pas non plus — décemment — se déprécier, il ne lui restait que la voie la plus haïssable, celle du juste milieu. Ainsi, il n'est laissé, à l'auteur de ce recueil, que de préciser qu'il fut établi par ses soins, et qu'il renferme des textes s'étalant sur 40 années, de 1939 à 1979, contiguïté qui, en les alignant au même niveau, les réactualise malgré l'illusoire volée du temps. Que dire encore de cet ouvrage, sinon qu'il lui apparaît comme proprement indescriptible, ce qui s'entend, aussi bien pour le meilleur, que pour le pire. Marcel Mariën