Toute ma vie je me suis fait « une certaine idée » de la messe. Je ne la concevais que sous sa forme la plus solennelle, la plus noble, la plus imbue de sacré, la plus digne du Roi des cieux, celle, en un mot, d’une véritable cérémonie. Cette pompe associée dans mon esprit à l’office divin, au point d’être presque inséparable de lui, culminait dans les admirables messes pontificales que célébrait, durant mon enfance, l’évêque de Poitiers, Mgr de Durfort, messes pour lesquelles manifestement il n’avait pas un goût moins vif que le mien. Il s’y dépensait un art de la mise en scène que je ne retrouverais plus tard que dans certaines séquences de Zeffirelli, celle en particulier de son film sur saint François d’Assise, où le pape entouré de toute la cour pontificale reçoit en audience le moine mendiant et, se prosternant devant lui, lui baise les pieds — tableau qui représente pour moi l’une des apogées de la symbolique religieuse, car le faste le plus provocant s’y conjugue avec la plus évangélique humilité, le premier seul donnant tout son prix à la seconde.