« Chez nous, c’est le Pays de Loiron, aux marches de Bretagne, en Mayenne. Comme tous les gosses de mon village, j’ai appris à marcher avec saint Arrotin, un petit saint rien que pour nous autres. Maman s’était morte en couches, alors Mémée m’avait recueilli. En plus de moi, elle nourrissait aussi un petit pourceau orphelin, au biberon ! Mon père, c’était un métayer miséreux, son maître était dur. Le Jules, le commis de ferme à la Mémée, y se faisait des extras dans les noces avec son violon, les danseurs l’appréciaient. Il était un peu sorcier, aussi. À 13 ans, je suis parti apprenti-mouleur à la fonderie Chappée… » Une enquête minutieuse et plus de deux mille photographies recueillies auprès des anciens d’un pays du bocage ont fourni la matière première de cet ouvrage illustré et de l’exposition itinérante sur l’univers paysan et ouvrier mayennais qui a précédé le livre : Images d’un monde. Parmi toutes ces photographies, le portrait d’un inconnu sur son lit de mort offre à Pierre Guicheney le point de départ de son récit. L’humble et anonyme héros nous conte l’entrée dans le XXe siècle d’une campagne française où la dureté des conditions ouvrière et paysanne, la persistance d’une pensée magique et l’omniprésence de la religion brossent un tableau qui surprendra plus d’un lecteur. Mémoire des humbles ? Ethnologie ? Roman-photo d’un siècle dans le bocage ? Tout cela, sans doute. Avec quelque chose en plus : la chaleur, l’humour et l’écriture d’un auteur de talent. Cet ouvrage est préfacé par Pascal Dibie, ethnologue.