« Je vous embauche à 130 heures par mois, vous signez ce contrat, mais on est d’accord : vous faites 190 heures, compris ? » Comment défendre ses droits lorsque l’on est sous la menace du chômage ? C’est une horreur sociale que nous découvrons avec l’auteur à travers ses visites au cœur de Paris. Bijouterie, maroquinerie, confection, hôtellerie, restauration, commerce, bâtiment, métallurgie, chimie : derrière les vitrines, locaux insalubres, ateliers inflammables, pointeuses truquées, faux temps partiels… Parfois, le récit se fait insoutenable : une main coupée sur un chantier, une sous-traitance illicite qui fait deux morts, un manœuvre malien écrasé. Parfois c’est l’infarctus du cadre supérieur, parfois c’est la blessure intime à cause de l’usure, parfois le sursaut pour la dignité, la lutte. Sur-travail, sous-travail, sans-travail… la déréglementation fait rage dans la vie quotidienne des salariés soumis à la flexibilité, au stress, aux accidents du travail, aux maladies professionnelles, aux horaires à rallonge, au chantage à l’emploi. Tel est le décor ordinaire que traversent ceux qui visitent les entreprises aujourd’hui, inspecteurs et contrôleurs du travail. Gérard Filoche est l’un d’entre eux : il décrit, analyse, mais interprète aussi. Ce livre n’est pas seulement le récit d’une rencontre quotidienne avec le « travail jetable ». C’est aussi un plaidoyer illustré, concret, pour un projet social, les 35 heures hebdomadaires, sans perte de salaire, qui pourrait créer des emplois et redistribuer les richesses.