Dégager une théorie réellement liée à une pratique, c’est-à-dire une praxis de l’évaluation, c’est ce que tentent par ce livre Jacques Ardoino et Guy Berger. Ils veulent distinguer de l’évaluation, véritable processus dialectique d’analyse de la complexité, le contrôle, assujetti à la logique de la preuve et à la recherche de la conformité. Or, la tendance triviale est à confondre l’un et l’autre, alors que ces deux fonctions critiques sont complémentaires. Pour déployer leur démonstration, ils s’appuient sur trois études de cas d’évaluation d’unités universitaires (Sciences de l’Éducation à Strasbourg 1 et à Aix-Marseille 1 ; la FOPA en Belgique) et évoquent en annexe le cas de Paris 8. Ils interrogent ainsi non seulement la question actuelle des audits d’organisations ou d’institutions, mais à travers la méthodologie mise en œuvre par le Comité National d’Évaluation à propos des universités, l’épistémologie d’une praxis congruente où l’évaluation se globaliserait comme un acte et n’en resterait pas au décompte des miettes. C’est une mise au point aussi bien praxéologique que scientifique qui, beaucoup plus qu’un outil réduit à son mode d’emploi, vient heureusement nous proposer une véritable démarche et sa problématique (étayées par un glossaire approfondi de quelque quatre-vingt-onze mots). Mais sans pour autant refuser la polémique, conçue par les auteurs comme la maïeutique même du concept. Peut-on évaluer sans s’évaluer ? Et évaluer sans intervenir sur le dispositif d’évaluation ?