« Cette complicité inespérée, presque biologique, entre Ferdinand et cette femme qui avait si décisivement contribué à sa formation intellectuelle, provoquait en lui un sentiment curieux, inextricable, où l’admiration côtoyait cette forme particulière de désir qu’est la tendresse. En effet, la proximité physique de cette nonagénaire, loin d’être repoussante, se révélait singulièrement voluptueuse. Et le besoin qu’il avait chaque jour plus obstinément de la proximité physique de Marie-Ange n’était au fond pas si différent du désir violent et essentiellement bestial qu’il éprouvait pour les jambes de Gwendoline. Non qu’il eût l’envie macabre de lui faire l’amour. Mais, en demeurant proche d’elle, en la touchant, il avait l’impression de s’approprier un peu de l’ardeur, tout à la fois divine et humaine, d’un être qui s’était si totalement réalisé. Ce savant dosage de génie, d’expérience et de juvénilité la rendait presque désirable. Et Ferdinand se prenait à rêver des nombreux hommes qu’elle avait rendus fous tant elle avait dû être, tant elle était encore de ces femmes dont l’attirance est sans antidote ».