Quand le téléphone sonna, j’étais allongé sur mon canapé et je somnolais une main posée sur le front. J’attendis avant de décrocher, tendis la main, puis : – Larno… J’écoute… Au bout, après un silence, ce fut une voix d’homme qui me répondit : – Bonjour, Monsieur Larno. Nous n’avons pas l’honneur de nous connaître, mais – j’ai un travail à vous proposer. – Qui est à l’appareil ? – Pouvez-vous commencer dès demain ? L’intonation de la voix montait, puis descendait, traînait sur les syllabes ; une voix à la Jouvet ; un rien agaçante. – Écoutez, je lui dis, je suis crevé. Passez à mon bureau mardi ou jeudi, entre dix heures et midi. Ou rappelez-moi un autre jour ; j’ai un répondeur. – C’est impossible. – Alors, au revoir. – Un instant, Monsieur Larno ! N’ai-je pas été assez clair ? Pour dire ça, l’homme n’éleva pas la voix ; au contraire, il était encore plus poli, presque obséquieux. – Comment ça, clair ? – Vous travaillerez pour moi. – Vous êtes qui, pour l’exiger ? – Vous m’appellerez M. – M, comment ? – Comme la treizième lettre de l’alphabet.