Ce livre est un coup de colère. Contre les confusions, les simagrées, les états d’âme, qui minent la gauche de ce pays. Coup de colère pour que la pensée de la gauche ait un peu plus de tenue et ne soit point abandonnée au méli-mélo du dandysme parisien. Cette contre-attaque idéologique n’est-elle pas désormais urgente quand la droite vindicative et subversive sape et corrode les fondements de notre démocratie ? Que cet éclat et ces idées jaillissent des bords du fleuve, entre Nantes et Saint-Nazaire, n’étonnera personne. On sait depuis longtemps qu’y rampe une pensée insoumise. Les cabochards d’ici éprouvent-ils un brin de bonheur, un brin d’inquiétude, un brin de spleen ? Comment l’épancher autrement qu’en déambulant sur les quais, tandis que des bateaux en tous genres sillonnent le fleuve et suggèrent, en pleine cité, les rêves de l’ailleurs et du possible ? Alors la pensée de ces réfractaires court, incertaine, partagée entre le rêve et la réalité, écartelée entre le sauvage et le construit. Mais de quel fleuve s’agit-il ? de la Loire vraiment ? de la Loire seulement ? N’est-ce pas aussi le symbole de ces fleuves de partout, au bord desquels se coagulent les humains, traversés ainsi par de puissants courants ? N’est-ce pas surtout ce fleuve imaginaire qui n’existe que dans la tête de chacun, où le flux et le reflux des idées composent une musique bien à soi, irréductible et sans cesse renouvelée ? À chacun sa musique. À chacun son fleuve.