« Ostéoporose » : voilà bien le genre de mot qu’on peut trouver joli, « poétique », tant qu’on ne sait pas ce qu’il veut dire. Ça pourrait être, pourquoi pas, le bruit des vagues dans un coquillage en bord de mer… La réalité sémantique est plus douloureuse. A priori, donc, pas de quoi en tirer un chant. Et c’est là qu’intervient la magie d’Odile Caradec : car elle connaît la signification clinique du mot, mais elle le détourne, le magnifie plutôt, pour lui donner toute la poésie qu’il y a aussi dans ses os, ses sons, ses syllabes. Tout au long de ses poèmes, Odile Caradec ne nie pas l’hiver, la vieillesse, la souffrance, la mort, mais elle leur fait, fidèle à son style inimitable, de délicieux pieds de nez : Ah ! les pieds des grands-mères il faut les mettre sous la cendre comme les pommes de terre du temps jadis les merveilleuses pommes de terre cuites à la cendre mangées sans beurre, noires et chaudes la peau si bonne et la pulpe tant délectable C’est un livre dont on ne sort pas guéri (on ne guérit de rien), mais il fait devenir rieur et fraternel. C’est merveilleux. Jean-Claude Martin