Fuyant les persécutions et la misère, elles sont deux sœurs venues du fond de la Russie : la cadette, Esther, belle et avide de vivre, et Judith, effacée par ce rayonnement, devenue l’esclave silencieuse des tâches obscures — on l’a surnommée « le Rat ». Après une traversée de l’Europe jalonnée d’amants et de maris de plus en plus riches pour Esther, elles habitent maintenant New York. Elles y vivent des fortunes d’Esther, avec tous les enfants qu’elle a eus. Judith gère pendant que sa sœur règne, comme une reine termite. Mais cette femme, dont la beauté et l’ambition ont triomphé de la vie et des hommes, n’a donné le jour qu’à des ratés, et elle a achevé de les écraser sous son autoritarisme et son mépris. Sauf un, Théo : elle a senti qu’il serait un témoin. Et il l’est en effet, épiant et écoutant derrière les tentures, avec la complicité tacite de sa mère : greffier secret du tribunal qu’elle tient de temps en temps pour « exécuter » l’un ou l’autre ; fidèle chroniqueur des amours, des lâchetés, des trahisons, des haines, des drames (y compris du sien propre). Jusqu’au jour où un papillon aux ailes brûlées lui apportera la vision de la fin.