Après le Dit de Marguerite où la mère de Suzanne Prou évoquait ses années de jeunesse, ce sont « les enfances de Suzanne » que nous découvrons dans ce livre. Fille d’officier, Suzanne connaît, dès son plus jeune âge, l’existence vagabonde des militaires en garnison. C’est d’abord l’Algérie « française » des années trente, Biskra, la « petite rose du Sahel » et la citadelle de Djidgelli au bord de la mer, puis le grand départ pour l’Indochine. À sept ans, Suzanne appréhende le monde et ses merveilles au cours du long voyage qui la mènera de Marseille à Saïgon, avec des escales à Port-Saïd, Djibouti et Singapour. À Nam-Dinh, où la famille séjournera huit ans, c’est une nouvelle « enfance » qui commence pour elle. Tandis que les « grandes personnes » perpétuent les rites de la société coloniale, boivent des drinks et dansent le charleston, servies par des boys en veste blanche, la « petite Tonkinoise », elle, sera fascinée par un jardin enchanté, une nature dont l’exubérance, la beauté sensuelle s’accorderont aux premiers troubles de l’adolescence. Sans doute gardera-t-elle toujours au cœur la nostalgie d’un pays qu’elle ne reverra plus. Nostalgie d’un bonheur qui la fera vivre et nourrira secrètement son œuvre.