L’idée de rendre hommage, geste d’amitié à travers le temps, à Marceline Desbordes-Valmore, m’obsédait. Déjà, Baudelaire, Barbey d’Aurevilly, Verlaine, Rimbaud, puis Aragon, Robert Sabatier, s’y sont essayés. Cette femme poète, la première des romantiques, qui n’a pas hésité à chanter le désespoir d’un amour interdit, non plus que la révolte contre le pouvoir, fut saluée par Vigny, Lamartine, Hugo. Ses contemporains. Voilà des raisons plus que suffisantes pour aller à sa rencontre. Il ne s’agit pas de retracer sa vie ; il s’agit de faire revivre Marceline, mais aussi de faire revivre l’envie d’écrire de deux petites filles flamandes, elle et moi, dire l’importance pour elle, pour moi, de sa mère, de la mienne, la joie du premier enfant, le regret d’une amitié qu’on a laissée passer, le souvenir d’un beau texte, et d’un fou rire inattendu. Révélateur, pierre de touche, Marceline n’est pourtant pas mon modèle : elle est inimitable. Elle me révolte, me bouleverse, m’exaspère parfois - je ne cesse pas de l’aimer, ni de l’admirer pour autant. Elle me déconcerte aussi - alors je me retourne vers mon passé. Étais-je ainsi ? Ai-je vraiment écrit cela ? Et je me déconcerte moi-même.