La seule question à laquelle j’aimerais répondre, à propos de « La Saignée », serait : « Pourquoi un livre ? ». Parce que la littérature, c’est tout de même le plus court chemin pour parvenir à la trahison de ce que l’on aime, de ce que l’on veut, parfois même de ce que l’on fait. Parce que le lecteur n’a, en réalité, et malgré tout ce qui a pu être dit à ce sujet, aucune part. Parce que, dans un livre, ce qui est le plus vrai, c’est le mode de fabrication, la motivation de telle ou telle phrase — qu’il est si facile de faire mentir — la raison de ces instants qu’on dit privilégiés, qui vous poussent à exécuter ce travail plutôt qu’un autre. Écrire un livre, ce n’est pas très différent de la somme des gestes simples et inachevés que nous accumulons en une journée. Une journée aussi terne que les autres. Avec, tout au bout, toujours les mêmes interrogations, prétentieuses à force d’avoir été formulées. L’auréole infligée — de moins en moins, heureusement — à qui écrit un livre, il n’y a rien de plus vain.