Au terme des grandes vacances, le narrateur qui a parcouru l’Espagne au volant de sa Dauphine avec sa femme et ses deux filles est arrêté, pour un léger accident, par la police de Franco juste avant de repasser la frontière : une aile de sa voiture a éraflé au passage un piéton. Le processus du procès-verbal devant le commissaire se déroule dans une langue qu’il ne comprend pas ; il se retrouve le même soir privé de tous ses papiers et séparé de sa famille dans un cachot où la nuit commence. Et c’est au récit de cette nuit logique que l’auteur nous convie, démontrant peu à peu que l’emprisonnement du corps délivre l’âme et l’esprit, épanouit la mémoire. Car au cours de ses heures d’angoisse, le narrateur va revivre des moments de son existence d’homme libre en y puisant une étrange et douloureuse jouissance différée. Comme un film, repassent les étapes de son voyage au pays de la lumière, la mer et la plage, la montagne et les bonnes nourritures, les églises et la feria, auxquels se rattachent ensuite certains souvenirs de juin 1940, puis de l’occupation allemande. Ainsi s’écoule et se clôt le temps du cauchemar éveillé jusqu’à l’aube, lorsque s’approche un bruit de pas qui est, logiquement aussi, celui de la délivrance.