Adoptant une perspective socio-historique, cette étude se propose de replacer le surgissement du mouvement chrétien dans son contexte. Elle s'intéresse, tout particulièrement, aux origines de l'Église primitive de Jérusalem, et s'efforce de déterminer quels développements elle connut sous l'égide de Pierre, avant de s'interroger sur les causes de son départ. Au passage, les hypothèses suivantes sont proposées : la communauté primitive de Jérusalem a, dans un premier temps, adopté une organisation et développé une conscience de soi, qui permettent de supposer une influence essénienne ; elle a élaboré une ecclésiologie (nouveau Temple) et une christologie très hardies, qui se sont exprimées notamment à travers une relecture des origines de la communauté et du ministère de Jésus, considéré comme étape décisive de l'histoire du Salut, en fonction des grandes fêtes juives ; elle a manifesté, dans la fixation de ces traditions, un intérêt particulier pour la figure de Pierre. Si ce dernier a, finalement, dû céder le pas à Jacques, c'est en raison de la situation nouvelle que créèrent les agissements des Hellénistes et de Paul, et de la nécessité où la communauté se trouvait, pour préserver son existence, de se conformer à l'orthopraxie juive. Elle trouva la caution de son conformisme dans l'adoption d'un christianisme dynastique, et se sépara d'un chef que la vision narrée en Ac 10, 9-16 avait éloigné d'elle.