À 43 ans, par la seule vertu de sa qualité d’éminent spécialiste des transports, Jean Berthelot s’est trouvé ministre du maréchal Pétain, peu après l’armistice de juin 1940. Une France exsangue, brisée, démantelée, lui tombe sur les bras : il faut relancer les ponts, raccorder les voies ferrées, faire rouler les trains, rétablir les routes, camoufler le matériel que les Allemands veulent confisquer, protéger les cheminots contre les représailles de l’occupant. Après vingt-cinq ans de silence, les souvenirs qu’il nous livre avec lucidité constituent un témoignage important sur ces deux premières années de l’occupation où un grand nombre de Français mettaient encore tout leur espoir dans le vainqueur de Verdun. Jean Berthelot, sans passion, donne le point de vue du technicien confronté aux amères réalités de la politique. A travers lui, nous entrons dans le secret de la faiblesse des derniers gouvernements de la IIIe République. Nous assistons au drame de mai et juin 1940. Nous sommes tantôt à l’Hôtel du Parc à Vichy, tantôt sur toutes les routes de l’Empire où des hommes s’efforcent de maintenir l’essentiel. Sur les intrigues de Laval, sur les actions ambiguës de l’amiral Darlan, sur l’action du général Weygand, notamment, ce livre apporte une série de précisions qui manquaient encore à l’historien.