Ces trois vers de Gottfried Benn font naître du sordide et de la chair brisée la poésie la plus volatile, comme est l’alcali : celle du point rouge d’une cigarette dans la nuit, celle des veilleuses bleues des trains de luxe, celle de l’âme à l’instant qu’elle se sépare. La poésie, le bruit en court, peut être mortelle. Ainsi de l’expérience vécue, faits divers ou cartes postales, hideux feuillets d’un carnet de damné. Il est un point où, de désir, elle devient audace. Riche et forte de sa nuit, elle prend des risques et se fait connaissance. Elle révèle le poète, comme le sel d’argent l’image. Elle est "la langue naturelle de ce que nous sommes sans le savoir", écrit Joë Bousquet.