« L’œil est fait pour voir », « seuls les plus adaptés survivent », « l’évolution est un progrès ». Autant d’affirmations qui assimilent implicitement le travail de la nature à celui d’un ingénieur. La biologie est la seule science qui, encore aujourd’hui, accorde une telle place au finalisme, banni depuis l’époque moderne en raison de son anthropomorphisme. N’est-ce là qu’une métaphore pédagogique ? Henri Bergson y voyait au contraire le symptôme de l’échec de la pensée mécaniste. En 1907, il écrit L’Évolution créatrice dans lequel, tout en défendant l’évolutionnisme, il en critique l’approche trop mécaniste. La théorie de l’évolution, telle qu’elle est formulée à son époque, est incapable de prendre en compte l’histoire et l’action créatrice des vivants ; elle est donc condamnée à attribuer tacitement à la nature des intentions et à se charger ainsi de présupposés lourds de métaphysique. Qu’en est-il aujourd’hui ? Le néodarwinisme échappe-t-il aux accusations bergsoniennes ? Peut-on comprendre l’évolution par-delà tout finalisme ? Mêlant histoire des sciences, philosophie et biologie contemporaine, cet ouvrage explore le rôle joué par le finalisme dans la biologie de l’évolution, en étudiant l’œil de la coquille Saint-Jacques, les interactions du cloporte et les bagarres des hyènes, sur fond de philosophie bergsonienne.