Que faire de la souveraineté, d’une idée de la souveraineté qui semble sortir plus dense de toutes nos tentatives pour nous en débarrasser ? Ne devons-nous pas plutôt l’effriter de l’intérieur, depuis son caractère absolu, exclusif, purement théorique, depuis son indifférence, depuis sa suffisance, pour comprendre qu’elle se joue en fait toujours dans le repli et la négation, qu’elle est d’abord un signe de faiblesse. L’analyse de la construction du principe de souveraineté et de sa mise au centre du politique à l’aube des Temps Modernes nous montre en effet une souveraineté essentiellement inquiète d’elle-même et n’ayant de sens que dans cette inquiétude, dans le projet de signifier, à l’encontre de Machiavel, que le politique peut être à l’abri de la variation et de la division. Cette souveraineté-là, dont on peut suivre pas à pas la construction dans les textes de Bodin, se révèle avant tout dans les relations de manque et de repli qu’elle doit entretenir avec le droit et le gouvernement.