Au cœur de nos préoccupations esthétiques et médicales : les corps. Ces corps que nous nous attachons à parfaire, à modeler et normaliser. Ces corps pourtant réduits au silence, sans cesse maintenus à distance raisonnable de ce que nous sommes. C’est à l’un de ces corps que Sophie Benard donne une voix. D’objet de manipulation et d’observation, le corps devient alors conteur. En nouant avec lui un dialogue, l’autrice se faufile dans les plis d’un être et d’une histoire, se souvient de la perte des premières dents, se passionne pour l’anatomie, s’étonne des désirs et plaisirs, pleure les deuils qui mènent à l’absence des corps aimés. Au scalpel de sa plume elle se dépèce, sans s’épargner ni nous préserver, et déploie la multitude des états du corps – supplicié, désirant, privé, meurtri, nié, jaillissant. Avec insolence, humour ou émotion, elle explore ainsi de son infectieuse curiosité l’éternelle question du lien entre le corps et l’esprit, s’affronte aux interrogations scientifiques, sociologiques et philosophiques qui en résultent. Et elle rend aux corps, enfin, leur légitimité littéraire.