Philippe-le-Bel avait été élevé par un dominicain. Il avait pour confesseur un dominicain. Longtemps ces moines avaient été amis des Templiers, au point même qu'ils s'étaient engagés à solliciter de chaque mourant qu'ils confesseraient un legs pour le Temple. Mais peu à peu les deux ordres étaient devenus rivaux. Les dominicains avaient un ordre militaire à eux, les Cavalieri Gaudenti, qui ne prit pas grand essor. A cette rivalité accidentelle il faut ajouter une cause fondamentale de haine. Les Templiers étaient nobles ; les dominicains, les Mendiants, étaient en grande partie roturiers (. ). Dans les Mendiants, comme dans les légistes conseillers de Philippe-le-Bel, il y avait contre les nobles, les hommes d'armes, les chevaliers, un fonds commun de malveillance, un levain de haine niveleuse. Les légistes devaient haïr les Templiers comme moines ; les dominicains les détestaient comme gens d'armes, comme moines mondains, qui réunissaient les profits de la sainteté et l'orgueil de la vie militaire. (. ) Le coup ne fut pas imprévu, comme on l'a dit. Les Templiers eurent le temps de le voir venir. Mais l'orgueil les perdit ; ils crurent toujours qu'on n'oserait.