Faire l’histoire de la pensée de la guerre de 1780, date de la naissance de Clausewitz, à 1837, année de publication du dernier volume de ses œuvres complètes par sa veuve, tel est le pari d’Hervé Drévillon dans ce livre remarquable d’intelligence et d’originalité. Car au-delà du parcours du plus célèbre théoricien de la guerre, la période 1780-1837 se caractérise par l’émergence de la théorie militaire comme un véritable champ littéraire. Considéré, à cette époque, comme l’auteur de référence de ce domaine, Antoine de Jomini attaqua la théorie de Clausewitz et sa mise en œuvre qui s’appuyait sur une « plume facile » mais « parfois un peu vagabonde » et « surtout trop prétentieuse ». L’inconstance de la plume de Clausewitz reposa sur sa conscience aiguë des problématiques de la théorie militaire. Il est donc utile de s’appuyer dessus pour étudier la construction de la pensée militaire par de nombreux auteurs qui pensèrent et écrivirent la guerre. Contrairement à la vision idéaliste de Clausewitz, la plupart se référèrent à la réalité des conflits armés pour tenter d’offrir des principes répondant à des questions essentielles : que faire en guerre et quel est le lien entre guerre et politique ?