"Longtemps, j’ai ignoré la tragédie qui s’abattit au printemps 1944 sur la Ciociaria, ma région d’origine en Italie, ces innombrables exactions perpétrées par les “Libérateurs”, les troupes coloniales françaises, à l’encontre de la population civile : les viols des femmes, hommes, garçons ou fillettes, devant leurs proches. Par l’outrage sexuel, les soldats français ont martelé la défaite et l’humiliation dans la chair des Italiens. Longtemps, j’ai ignoré l’enfer qu’avaient enduré durant neuf mois les familles de cette terre, entre mer et montagne, dont je viens. J’avais entendu mes grands-parents, mes parents évoquer les années de guerre, les fascistes et les Allemands, la faim et la malaria, la vie en France après. Mais jamais un mot sur les violences commises là-bas par le contingent français… À l’été 2015, j’ai voulu ouvrir le linceul de l’oubli, lever le voile de la honte, partir sur les traces des “Marocchinate”, ces milliers de femmes italiennes violées en 1944 par des soldats du Corps expéditionnaire français, et oubliées."