Jour après jour, notre regard soutient l'insoutenable des images : guerres, génocides, terrorisme, actes de barbarie, humiliations, injustices extrêmes. L'effroi du présent nous devient familier. Le monstrueux a même un pouvoir hypnotique. Cette usure et cette sidération n'appellent-elles pas un autre régime d'images ? l'invention d'un regard qui ne soit ni trop proche ni trop lointain, ni obscène ni détaché ? Dominique Baqué examine les représentations de la violence dans le photojournalisme, l'art engagé ou « caritatif », le témoignage amateur, la vidéo trash. Elle s'arrête avec émotion sur le cinéma et sur les œuvres (photographie, vidéo, installation) qui évitent le piège de la compassion, réveillent les consciences par d'autres stratégies visuelles : l'appropriation, la théâtralisation, le retrait. Elle interroge la responsabilité de ceux qui font et de ceux qui regardent : peut-on « pactiser » avec l'inhumain ? Est-il des situations où l'art doit se retirer ? En définitive, quel rôle doit-il, veut-il et peut-il vraiment jouer ? Avec cette ultime question : en ces temps où de nouvelles violences sont infligées aux femmes, pourquoi l'art reste-t-il quasi muet ?