La somme de publications, de manuscrits et de témoignages qui concernent l'œuvre et la vie d'Althusser en feront sans doute un cas aussi exemplaire pour l'étude de la mélancolie que Schreber, lu par Freud, le fia pour la paranoïa.Face à un philosophe qui marqua toute une génération et dont les avancées renouvelèrent radicalement le marxisme, comme celles de Lacan donnèrent à Freud sa pleine efficacité, une question majeure se pose: quelle relation folie et raison entretiennent-elles? Loin de séparer son œuvre et son délire, et sans considérer un instant que la logique de ses thèses aurait été construite pour faire barrage à sa psychose, Althusser a cherché à élucider les points de jonction, les passes obscures, comme si la démence de l'histoire trouvait sa raison dans celle de sa propre folie.Cet ouvrage ne prétend pas interpréter ce qu'a écrit Althusser, et encore moins imaginer ce qu'il n'a pas écrit; il se propose de lire ce qu'Althusser appelait lui-même des symptômes, et d'effectuer ensuite des déductions si des recoupements suffisamment nombreux le permettent. Les conséquences en sont examinées aussi bien en auront, dans le champ du fantasme, qu'en aval, dans celui de la théorie, dès lors que le philosophe a donné des indications explicites qui autorisent cette démarche.