Je savais que j'étais née en Guadeloupe et que j'étais arrivée à l'âge de quatre ans chez Tata Michelle. J'en avais neuf, cette année-là où ma mère s'était présentée à la ferme avec sa lettre officielle qui l'autorisait à me reprendre. Cependant, même en forçant ma mémoire à réveiller des souvenirs endormis, sans mentir, j'avais l'intime conviction d'avoir toujours vécu dans la ferme de la Sarthe, auprès de ma Tata Michelle, la plus grande fan de Joséphine Baker, de Pépé Marcel, le seigneur des forêts magiques, et de Mémé Georgette toquée des crimes de sang. Dans l'avion du retour au pays, moins qu'un paquet jeté dans la soute du Boeing, je ne savais pas vers quoi je volais. Dans la voiture de Dame Viviane, j'ignorais ce vers quoi je roulais. De part et d'autre de la route, il n'y avait pas de champs de blé, pas de vaches, pas de pommiers, mais des plantations de canne à sucre et des bananeraies. Pas non plus de fermes isolées dans la campagne, mais des cases aux toits de tôle rouge posées sur les mornes. J'étais au pays de mes racines, comme disait ma mère. En 1984, Josette a neuf ans lorsqu'elle débarque en Guadeloupe. Elle découvre Théodora, sa grand-mère, et sa case peuplée de fantômes et d'esprits retors. Au pays natal, à la fois brutal et enchanteur, les fleurs qui s'épanouissent exhalent les secrets d'un passé fané et tourmenté. À la recherche de ses racines, ballottée et écartelée entre les mondes barbares, Josette va sur les traces de sa mère et prend parfois des airs de Joséphine Baker...