Éduquer comme instruire supposent, tout à la fois, une part de « nourrissage », comme disaient les Anciens, et une part de « lâcherprise » qui permet au sujet de « penser par lui-même », selon le voeu des Lumières. Depuis bien longtemps, les pédagogues se sont préoccupés de cette diffi cile articulation. En s’emparant de la métaphore de l’« étayage » empruntée au marin et au bâtisseur et déjà largement utilisée par les psychologues, Laurent Lescouarch nous offre une « entrée en pédagogie » particulièrement pertinente et féconde. Car il s’agit bien, pour lui, de s’interroger sur les pratiques pédagogiques qui « étayent » vraiment un sujet, c’est-à-dire qui lui permettent d’apprendre et de devenir autonome. En s’attachant plus particulièrement aux « publics qui résistent », il en tire des leçons pour tous. Plutôt que de rajouter sans cesse des prothèses nouvelles, il propose de s’interroger sur ce qui, à un moment donné, va vraiment contribuer à l’étayage d’une personne ou d’un groupe. Il se ressaisit ainsi des notions de « besoins », d’« aide », d’« accompagnement » de « dispositif » ou de « différenciation » pour proposer une conception globale de « l’étayage et du désatayage pédagogique » en termes d’écosystème. D’où son insistance sur le cadre (son caractère structurant et sa richesse), les rituels, les appuis au développement, les interactions de tutelle (avec le maître et entre pairs). D’où sa réfl exion sur les consignes, les niveaux de tâches proposés, la place de l’explicitation, les sanctions, l’évaluation, la stimulation de la réfl exivité et le processus de subjectivation.Ce faisant, Laurent Lescouarch donne matière à penser et à agir concrètement à tous les enseignants. Riche d’exemples, son livre nous montre comment tout éducateur doit devenir un constructeur d’architectures pédagogiques et un pourvoyeur de richesses culturelles qui permettront à l’élève de « s’instituer », c’est-à-dire de « tenir debout » par lui-même.