Qui disait que « je » était toujours un autre ? Dans « Senteurs d'hivernage », le 2e roman de Khadi Fall après « Mademba » paru dans la même collection en 1989, Anita Tembi Mkwanazi, 55 ans, citoyenne d'Afrique du Sud échouée fortuitement à Dakar, se reconnaît tantôt dans la jeune femme de vingt-quatre ans, tantôt dans la fillette de 11 ans, personnages qu'apparemment elle seule entend et voit parler sotho, la langue de son terroir natal, et que son imagination, semblant voler au secours de sa mémoire défaillante, restitue à la 3e personne du singulier.
Johannesbourg, Lydenbourg, encore Johannesbourg, puis Accra, Conakry et enfin Dakar, voilà le parcours tumultueux d'Anita qui, à la fois victime et artisan de l'histoire, de son histoire, finit par mener une vie relativement calme aux côtés de Badu, le prototype de l'intellectuel africain d'aujourd'hui.
« Senteurs d'hivernage » c'est aussi la constitution difficile d'un couple dans un contexte africain où, polygamie moderne ou traditionnelle oblige, le mot couple sonne parfois bizarre...