« Quand une mort, fût-elle exemple ou sacrifice, intervient pour interpeller un bonheur amoureux à l’écart dans sa certitude, le couple heureux concerné se regarde. Il tremble et s’abîme, il s’attriste comme s’il se salissait. Ce roman, je crois, a tenté de le dire. Mais il a été écrit en 1945, alors que nous sortions à peine d’un univers à la fois perturbé et clos, celui de l’Occupation et de la Résistance. Je l’avais fait lire à Aragon qui s’y intéressa suffisamment pour l’apporter à la Bibliothèque française où il parut en 1948. Je remercie les Éditions Messidor de le reprendre aujourd’hui — et plus de quarante ans après. C’est, bien sûr, le même texte. Il est ainsi tiré d’un long sommeil, je dirai presque d’une longue inexistence, cependant que les conditions, voire la signification de l’écriture — y compris l’écriture romanesque, ont changé. Comme ont changé, sans doute, les dimensions de la vie amoureuse et les conditions éventuelles du bonheur humain. L’auteur a, semble-t-il, le droit d’être heureusement surpris d’une résurrection, bien qu’il ne puisse guère parler d’un livre qui appartient à son passé. Il soulignera seulement que « la Mort de Laurent » était son second roman ; mais qu’il fut le dernier ; le dernier possible ; pour lui. » Jean Tortel, août 1989.