Dans le bar, c’est la frénésie et elle te pousse à monter sur une table. Les bouteilles de bière s’entrechoquent et tombent par terre. Ton cœur bat la chamade, te rappelle la caisse claire du crescendo le plus repris au monde, celui du Boléro de Ravel. Debout sur cette table ronde, tu es Ida Rubinstein, tu es Maïa Plissetskaïa, tu es Sylvie Guillem, tu es toutes ces étoiles qui l’ont dansé.Pour Prunelle, c’était écrit dans le ciel : après ses études à l’École de ballet, elle serait embauchée par une grande compagnie de danse. Jamais elle n’avait envisagé un futur où elle troquerait les rigoureuses séances d’entraînement contre une jobine dans le fin fond d’Hochelaga-Maisonneuve, la musique classique contre le punk et le ska, et les souris de Casse-Noisette contre l’authentique vermine urbaine. Elle devra plus que jamais s’accrocher aux paroles de la danseuse Marie-Agnès Gillot : « C’est dans la chute que je prends mon élan. »