ON écrit ce qu'on croit : puis, on croit ce qui est écrit », disait Barbusse. C'est ainsi qu'en moins de rien, en une génération, les rêves se transforment en cauchemars, les idées en coques vides, et les novateurs en gardiens de momies.Vivante et agissante pendant une bonne génération, notre littérature, depuis la guerre, ne fait plus que se répéter mécaniquement; innover, pour elle, c'est renchérir, et de préférence dans l'horrible, dans le monstrueux, dans l'exceptionnel. Autant dire qu'elle est morte, comme est morte l'époque qu'elle exprimait. Pour renaître, il lui faut d'abord briser net avec le passé récent.Depuis un demi-siècle, Dionysos règne en maître sur notre monde. Un obscurantisme d'inspiration romantique s'acharne à démanteler l'esprit comme la torture démantèle les corps. Le moment n'est-il pas venu de restaurer, dans l'art et ailleurs, le pouvoir d'Apollon, de la lumière et des lumières, de la raison ? La révolution nécessaire, c'est celle de la santé contre le sadisme et le masochisme, contre la veulerie et le dégoût; celle de la vie, celle de la paix. Et qu'on ne la croie pas facile! Il est plus difficile de se tenir droit et de respirer largement que de se vautrer dans la boue; aujourd'hui du moins, cela exige plus de courage, moins de niaiserie, et aussi quelque injustice à l'égard des grands hommes d'hier.Essai, tentative, brûlot, pamphlet, manifeste (peu importe le nom), ce petit livre s'efforce de contribuer à une « mise au net » de nos vraies valeurs. Plaidoyer pro domo d'un romancier ? Peut-être, mais surtout insurrection d'un homme de la rue; d'un homme parmi des milliers d'autres.