« Mes confidences les plus libres, je les fais à mon grillon. Au grillon qui accompagne familièrement mes rêveries, au coin de la cheminée. Mais voici que j’ai choisi de m’adresser à des personnages auxquels je suis capable de m’abandonner avec autant de confiance que j’en témoigne à mon grillon : les femmes politiques. Jugez-en : je leur parle sans retenue, presque sans pudeur, et évidemment sans malice, absolument sans méchanceté. Avec un parti pris cependant : je les crois indispensables et elles sont trop rares. L’étendue du monde, l’étendue du temps, les femmes elles-mêmes semblent s’être mises d’accord pour que l’univers féminin prolifère le moins possible. Nous y avons tous, sans doute, beaucoup perdu. Aujourd’hui, parmi tant de sujets qui sollicitent l’attention, en voici un d’importance. Je m’engage sans hésiter vers ces femmes d’exception. J’aime les êtres de sincérité, d’inquiétude et de foi et parmi les multiples vertus dont s’entoure l’âme, je préfère la lucidité et le courage. D’où mon admiration pour Antigone en qui la femme a trouvé son expression la plus exaltante. Mais j’aime aussi le grand chant de la liberté, les esprits non conventionnels, ceux qui tentent d’agiter leur époque. À ces agitatrices inspirées qui ne sont pas si nombreuses, j’ai voulu ajouter plusieurs personnes de talent qui sont souvent « l’idée qui dérange ». Si le monde n’est pas devenu plus excessif, si la conscience hurle encore et si on l’entend ; si la cité, l’église, le parti, qui vous ont cru des cibles naïves et dociles, n’ont pu affirmer finalement leurs disciplines ambiguës, nous le devons à vous seules, innombrables et anonymes héroïnes. Le vrai souffle des dieux, dont on ne sait où il mène, il est seulement en vous. Quand tout vous donne tort ou vous contraint, vous seules savez le reconnaître et l’entendre, et dire et redire, comme la jeune fille de Thèbes : « Je ne suis pas née pour haïr, mais pour aimer ». Sans cette parole, qui croirait encore aux Dieux ? Et vous la répétez inlassablement. »