Quelle fut et est encore la confrontation de la sagesse boulou et des philosophies occidentales, comment s’effectua ce « télescopage » de deux modes de pensée radicalement différents dans leur essence et dans leur fin ? Les Boulous sont une tribu qui appartient à l’ethnie béti qui fait elle-même partie de la famille bantou. Ils vivent dans la zone forestière du sud-Cameroun, dans ce monde clos de la forêt dense. La traite des esclaves puis l’expansion et la domination coloniale introduiront pourtant, dans cette communauté jusqu’alors fermée, un bouleversement peut-être irrémédiable, aussi bien dans les structures économiques, sociales et religieuses que dans la perception que les Boulous ont d’eux-mêmes et du monde. La tradition boulou pose la totalité comme sujet et se fonde sur l’harmonie qui implique l’adhésion et l’égalité de chaque élément de ce Tout. L’individu est soumis au groupe, lui-même régi par un code social, philosophique et religieux, une hiérarchie dont la rigueur et la complexité garantissent la survie et la cohésion de la communauté. Confrontés à des problèmes qui tiennent pour l’essentiel à la survie quotidienne, mis en situation d’infériorité par l’exploitation coloniale et néocoloniale, comment les Boulous, devenus autres qu’eux-mêmes, pourront-ils de nouveau être eux-mêmes ? Plaçant cette interrogation fondamentale dans le cadre large d’une réflexion philosophique, religieuse, économique et sociale, l’auteur s’engage également, avec courage et détermination, dans la voie d’un anti-impérialisme radical.