Été 1949. Joseph Kessel est alors le monstre sacré par excellence. Grand reporter, romancier à succès, aventurier des nuits parisiennes, l’auteur du Chant des partisans n’en demeure pas moins un homme complexe, fragile même, sous ses apparences de colosse. Silvain Reiner, lui, n’est rien. Il a survécu, plutôt mal que bien à la guerre, et n’a qu’une seule raison de vivre : l’écriture. Entre ces deux écrivains naîtra une amitié que Silvain Reiner restitue dans un récit sans complaisance aucune pour l’ogre qui le dévora de générosité. Entre deux visites à Jef, Silvain Reiner errait en piéton sarcastique dans un Saint-Germain-des-Prés où poètes, peintres et prétendus artistes brûlaient dans les bistrots leurs seuls biens : du temps et des illusions à la pelle. Arthur Adamov, Maurice Druon, René Julliard, André Schwarzbart, Georges Arnaud, Albert Cossery, Jacques Audiberti et bien d’autres personnages du monde littéraire apparaissent dans ce texte méchant à souhait. Le rire est ici un passeport pour une époque où vivre ne signifiait pas encore consommer.