La problématique territoriale, dans la construction européenne, est ancienne. Apparue au cours même de l'élaboration des Traités de Rome, où fut évoqué le risque de concentration de la prospérité dans une nouvelle « Lotharingie », elle inspira la recherche du « développement équilibré » des régions de la Communauté et, plus récemment, celle de la « cohésion économique » de l'Union. De nombreuses politiques communautaires, hors même la politique régionale, ont une dimension territoriale.La décentralisation, plus ou moins poussée, qu'ont connue les États membres au cours des dernières décennies, a progressivement enrichi cette problématique, en confiant aux collectivités territoriales des missions (économiques, sociales, culturelles), qui étaient autrefois remplies par les États et en les dotant de moyens - et parfois même de pouvoirs normatifs - indépendants de l'État. Or, seul l'État - en sa qualité de membre de la Communauté - répond devant les instances communautaires de l'application du droit communautaire par les organes publics, qui agissent sur son territoire. Longtemps protégées de l'impact du droit communautaire par l'écran étatique, les collectivités territoriales pouvaient ignorer ces contraintes. Elles ne le peuvent plus : leurs marchés publics, leurs services publics, leurs aides, bref l'ensemble de leurs actions… et de leurs omissions, sont désormais jugées à l'aune de leur compatibilité avec le droit communautaire.La problématique territoriale revêt une dimension plus fondamentale encore dans l'Union européenne, du fait de la création du Comité des régions par le Traité de Maastricht, et de l'interprétation que l'on songe, ici ou là, à donner du principe de subsidiarité.Un « partenariat » associait déjà les collectivités territoriales à la définition et à l'application de la politique régionale. Désormais, le Comité des régions, initialement défini par le Traité comme un « comité à caractère consultatif, composé de représentants des collectivités régionales et locales », revendique -tout naturellement - son accès au rang d'« Institution » de l'Union, ainsi que l'extension de ses pouvoirs et, notamment, la possibilité de porter certains recours devant la Cour de Justice. Il deviendrait ainsi le gardien du principe de subsidiarité, conçu non plus comme un système de répartition des compétences, entre l'Union et les États membres, mais comme s'appliquant aussi à la distribution des compétences entre les États membres et leurs collectivités territoriales, au moins pour l'application du droit communautaire.Par-delà cette mutation, c'est le problème de la légitimité politique, dans l'Union européenne, qui est posé : y a-t-il place, dans son système constitutionnel, pour une « représentation » territoriale, qui viendrait concurrencer la représentation « des peuples des États réunis dans la Communauté » qu'assure le Parlement européen ?Le présent ouvrage fait suite au Colloque organisé le 10 mai 1996, à Aix-en-Provence, dans le cadre d'une Journée nationale d'études de la CEDECE (Commission pour l'étude des Communautés européennes). Il s'inscrit dans le programme pluriannuel de recherche du CERIC sur « L'Union européenne et les régions ».Dans la même collection a été publié, en janvier 1997, un ouvrage collectif « Le Comité des régions de l'Union européenne », J. Bourrinet éditions.