Des femmes, des hommes et des enfants, enfermés de 12 à 14 heures par jour dans les "bagnes" industriels. Des grévistes, qui mettent leur costume du dimanche pour sortir de chez eux. Des ouvriers, qui modifient les couplets de la Marseillaise pour clamer : "Si ne veulent point nous rinquérir, in va bientôt tout démolir". Des patrons d'estaminet, appointés par le commissaire de police de Tourcoing pour "moucharder" ce qui se dira dans leurs établissements. Un préfet, qui oblige les grévistes à se promener et à chanter pour les fatiguer. Un préfet, qui souhaite la création des syndicats pour prévenir à tout jamais les désordres. Tout cela se passait dans le Nord, en avril-mai 1880. En 1892, ils n'ont pas été rinquéris. Ils n'ont pourtant rien démoli. Ils ont simplement élu, pour la première fois à Roubaix, une municipalité "collectiviste".