Voici les aventures oniriques de Dick, son voyage au pays des « êtres bizarres ». Grâce au lumignon offert par Œil-à-queue-de-comète, il s’envole, visite une antique demeure, est victime de « larcins » successifs, est plein de « dons » inattendus ; il suit une « voix », s’empare de la mémoire de Monsieur, tout en gardant secrètement des traces de la sienne, non sans perte des significations. Sous le signe de Michaux et de Tardieu, cette épopée est une traversée des miroirs. Monsieur est l’homme dans tous ses travers, ses oublis, ses faiblesses, son pouvoir d’agir aussi, son absence de rêve. Dick, quand il ne porte pas sa « livrée », est « la doublure », invisible à l’autre ; il est aussi l’homme corrigé par l’ironie et par la chance, doué d’imagination et accordé à la nature. Monsieur, l’homme au feutre, meule les heures, « ressasse », joue parfois avec Dick, rarement. Dick, en un sens, le commande en l’habitant, possède ses domaines et sa femme. Mais quelles sont les visées de Dick ? Veut-il affranchir Monsieur qu’il habite ? Lui dérober quel secret ? Ce périple fantastique est un jeu sur la connaissance de soi, non sans marge anthropophagique. Les thèmes en sont la possession de l’autre, les problèmes du temps, de l’immortalité. Du nom. Dick incarne la fantaisie contre les normes de la pesanteur, contre la mentalité d’ordinateur. Il est la poésie, la finesse. Il s’oppose au doute et au mépris. Ce jeu, ce guet perpétuel sont aussi une marche, une longue marche. Dans ce récit par séquences, on se trouve au milieu d’une ambiguïté d’ailleurs intéressante ; a-t-on pu vraiment se débarrasser de la « peur » ?