Après la fiction juridique du « pater is est quem nuptiœ demonstrant », après la vérité sociologique de la possession d’état, le Droit, fasciné par la science, est enclin à balayer la fameuse incertitude du père – « pater incertus » – en se tournant vers la biologie, l’examen des sangs ou l’analyse des empreintes génétiques, pour désigner le père « véritable ». Il n’hésite pas, par exemple, à permettre à une femme mariée d’arguer, sous certaines conditions, de son adultère pour dénier la paternité de son mari et lui arracher un enfant. Celui-ci serait-il censé supporter sans dommages l’anéantissement de sa filiation, l’effondrement de ses repères familiaux, la perte de son nom pour sacrifier à une vérité réductrice, lue dans son corps et dont il ne sait rien ? Dans le même temps, le Droit prévoit le brouillage des origines lors d’un accouchement sous X, d’une adoption plénière, d’un don d’ovule, de sperme ou d’embryon, indifférent aux conséquences, désastreuses pour un sujet, du secret sinon du mensonge sur l’origine de sa vie. Voilà quelques arêtes d’un bloc de difficultés auquel des juristes et des psychanalystes ont décidé de s’attaquer ensemble, en sachant que la filiation non seulement concerne mais fonde un être humain, et que la réduire à la transmission des caractères biologiques procède de la dérive génétique qui imprégna le nazisme. Dont actes.