Est-ce le goût des paris difficiles ? Yves la Prairie semble s’être donné pour objectif de réconcilier, ou du moins de rapprocher, la poésie musicale, rythmée, légère dans ses apparences, souvent qualifiée de traditionnelle, — c’est elle que la mémoire retient —, et la poésie moderne, davantage sensible au choc des mots, au bonheur des rencontres, aux résonances des images, à leurs ondes et à leurs échos. Il veut prouver que l’une n’exclut pas l’autre, que chacune traduit le passage « d’un moment du monde rattrapé au vol », parce que l’âme n’est pas un monolithe, ni l’inspiration un arc à une seule flèche. Mais l’originalité principale du recueil vient sans doute du fait qu’Yves la Prairie a pourcouru lui-même les « margelles » de l’Océan et exploré ses « puits sans fond ». Jusqu’à présent, très peu d’hommes dans le monde ont pu voir la face cachée de la mer, sous plusieurs milliers de mètres d’eau. Parmi eux, il est le premier à évoquer — en poète — ces plongées aux abysses, portes d’un nouveau monde dont la nuit éternelle frémit de tous les « tremblements ». Jean Orizet