Le poète a souvent pris le train. Ce lieu mobile est vite devenu un « entre-temps » de réflexion, d’introspection. Mais on peut numéroter les trains, saisir le prétexte d’un départ sur des rails, pour gagner l’onirisme, raconter l’histoire trouble d’un paysage, questionner des territoires intérieurs. « Train de vie dans le bidonville de la mort ». L’anecdote tend la main à la philosophie, et le train, redevenu un être vivant, « ne peut plus transiger avec la métaphysique ! ». Dans le chapitre « Saturnales », Micheline Dupray essaie de relever un cadastre de la fête tragique de nos vies, dans la mélancolie (« Les amoureux s’écrivent avec des feuilles mortes »), le souvenir cravaché de l’enfance, les saisons, une nature poignante. Le chapitre « Femmes » tente, avec une riche simplicité, de dire par le cœur autant que par le ventre la difficulté d’être, d’autres voyages, les absolus, « les nourritures du naturel », ce qu’on nomme l’amour. La langue est souple et belle, et dans les poèmes on découvre de hautes et pures images.