Je me permets d’ajouter ici au titre de Joseph Danan, L’Éveil des ténèbres, une ponctuation dubitative, bien dans l’esprit, me semble-t-il, de cette pièce que j’ai lue et relue avec un intérêt sans cesse accru. J’ai été charmé par ces répliques elliptiques, par la fluidité des enchaînements, la légèreté de touche, bref par l’élégance et le nuancé de l’écriture. J’ai été surpris par la violence subite, tranquille, affreusement naturelle qui, dans une forme expressionniste, surgit d’abord avec le viol, puis sous l’apparence d’un crime antisémite. (Au moment où j’écris ces quelques mots, des Serbes — chacun y pense — se font, par le viol et le crime, les champions d’une nouvelle purification ethnique). J’ai été pensif devant les dévoiements possibles de la recherche scientifique. Ici la monstruosité est le fait d’un physicien en renom. Il faut aujourd’hui, plus que jamais, reprendre la réflexion contenue dans l’antique formule : Science sans conscience… J’ai été rêveur face aux questions sans fin, angoissantes, sur lesquelles ouvre la pièce : pourquoi quelque chose plutôt que rien ? Qu’est-ce que le réel ? Pourquoi la vie ? Pour quoi vivre ? Sommes-nous libres ou déterminés ? Le bien, le mal ? Pourquoi la haine ? J’ai été éveillé par toutes ces questions suggérées avec tact, auxquelles jamais l’auteur n’impose ne serait-ce que le début d’une réponse, laissant entier chez le lecteur le plaisir du questionnement.