Il n’y a pas eu normalisation. En trois jours d’août 1991, la jeune démocratie soviétique a su mettre en échec le putsch des conservateurs et donner aussi un nouvel élan au changement. Et lequel... Il fallut ce séisme pour que le monde comprenne à quel point la perestroïka avait bouleversé l’URSS, à quel point ces courtes années de travail gorbatchévien avaient brisé les monolithismes soviétiques et donné naissance à une autre Russie. Il a fallu que tout tangue, qu’on prenne peur du naufrage et de ses remous pour qu’on voit à quel point la prudence entêtée du dernier secrétaire général avait jusqu’au bout canalisé le chaos. Il a fallu qu’on découvre l’ampleur de ce front du refus, l’étendue de cette conspiration pour réaliser ce qui aurait pu se passer six mois ou deux ans plus tôt, avant les élections, avant la démocratie, avant la liberté de la presse : avant tout ce qu’ont permis Mikhaïl Gorbatchev et son train de tortue obstinée.