Née au pied d’un monastère du Xe siècle, Saint-Sever s’est développée aux XIIe et XIIIe sous la domination du roi-duc d’Aquitaine. La vitalité de l’agglomération se mesure aux tentatives très précoces d’émancipation collégiale qui marquent son histoire municipale. Les premières concessions, proches des fors pyrénéens, sont du début du XIIe siècle. Il s’est ainsi formé peu à peu un ensemble de coutumes, par moitié très archaïques, par moitié très neuves. Pendant la tourmente de la guerre de Cent ans, où Saint-Sever eut à souffrir, ce corps d’usages prit forme, et en 1357 le roi-duc fit pression sur l’abbé de Saint-Sever pour l’amener à accepter la rédaction d’une coutume, qu’il avalisera en 1380. De ce livre, nous avons la version en latin incluse dans les Rôles gascons, et une copie de 1480 en langue commune, au total 132 articles. Ce sont ces deux documents, qui se confortent, qui sont ici présentés en vis-à-vis. L’intérêt du texte n’est pas que d’ordre linguistique ; il s’agit d’un recueil d’articles de droit privé et pénal, de prescriptions exécutoires et de procédure, touchant à l’administration de la communauté, la gestion des biens, le statut des hommes, notamment de la famille. On notera la solidité de cette dernière, la force des liens entre « voisins », visage ancien, mais d’autres traits plus évolués, par exemple la notion de circonstances atténuantes. Ce document d’une grande richesse juridique, et jusqu’ici peu utilisé, rendra des services certains à de nombreux chercheurs. Robert Fossier