Anne-Marie est une femme de décision. Spécialisée dans l’élevage porcin, elle domine, elle étripe, elle nourrit un peuple de cochons. Aînée de sept enfants, elle quitte l’école à treize ans pour la ferme. Pas d’argent, dix-huit heures de travail par jour, les frères, les sœurs, les bêtes, la terre... Pas de distractions, même le dimanche. Trop rarement la plage... à dix kilomètres de là. C’était en 1965, dans le petit village breton de Saint-Cano. Joseph, elle l’a épousé à dix-huit ans. Ils ont aujourd’hui deux enfants. Anne-Marie, femme de tête et d’aventure, a trente ans. Par tous les temps, elle court les réunions syndicales au volant de sa voiture. Pas « paysanne », mais professionnelle. Pas non plus « femme de paysan » : agricultrice à part entière. N’a-t-elle pas un jour tendu un porcelet au nez distingué de nos gouvernants ? Anne-Marie est présidente du Centre départemental des jeunes agriculteurs. Ce qu’elle veut ? Que ça change, que chaque exploitant puisse prendre sa vie en mains, décemment. Elle, à force de volonté, l’a fait.