René Massigli, Ambassadeur de France, est entré au service de l’État à la fin de l’autre guerre. Ayant quitté le Quai d’Orsay au lendemain de Munich pour Ankara, ce n’est que quinze années plus tard qu’il a été rappelé de l’Ambassade de Londres, pour servir de nouveau à Paris, où il se trouvait en présence de structures administratives profondément détériorées. Ses souvenirs lui ont permis d’établir alors des comparaisons, qui l’ont aidé à dégager, et à définir, un certain nombre de maladies dont se trouvent actuellement affectés les mécanismes internes de l’État. Tout en reconnaissant l’extrême nécessité d’une réforme constitutionnelle et d’une réforme électorale, M. Massigli pense que le problème de nos mœurs politiques pose des questions aussi urgentes que celui des institutions, et c’est aux conditions de fonctionnement des mécanismes administratifs que l’auteur s’attaque. Les phénomènes qu’il dénonce sont liés, pour lui, aux méthodes gouvernementales ; d’autre part, ils découlent des conditions - nécessairement imparfaites - dans lesquelles, au lendemain de la Libération, les organismes du pays ont été remis en marche. Il ne s’agit nullement ici de mettre en cause des groupes ou des personnes ; et c’est, systématiquement, que M. Massigli a évité de le faire, les responsabilités des maux qu’il dénonce étant fort partagées. Les conclusions auxquelles l’auteur aboutit, ne sont pas pessimistes : la volonté soutenue de quelques hommes peut, selon lui, suffire pour apporter la guérison. Mais le temps presse. Nous savons que 1958 est l’année des échéances, pour le Marché commun, pour l’Algérie, bientôt pour l’Afrique Noire. Écrit avant les récents événements d’Alger, ce livre consacré à la détérioration des mécanismes de l’État les éclaire et, pour une part, les explique. Chacun se doit de le lire et de le méditer.