La science nous a toujours paru comme un fondement de valeurs sûres.. Elle nous a garanti l’honnêteté dans la recherche, une bonté implicite dans ses buts et la certitude du progrès. Elle est arrivée à nous fournir le sens de l’absolu et la signification la plus concrète de l’humain. Depuis quelque temps cependant, le mythe de la science s’effrite : elle est accusée, entre autres, de cautionner des manipulations génétiques qui détruiraient l’individualité, et d’avoir fabriqué la bombe atomique qui pourrait supprimer l’humanité tout entière. La science ne semble plus capable de nous assurer un absolu réconfortant, et cette relativité qui imprègne les hypothèses, les modèles et les résultats de toute recherche, est vécue comme une déchéance, une mystification. Mais à la base de ces transformations, il y a une profonde interrogation : il n’est plus question de croire à une seule vérité, et les concepts mêmes sont remis en cause. Il en est ainsi pour l’un des piliers de la science : la médecine, dont les certitudes et les valeurs sont devenues indéterminations et questionnements. Et dans le cadre de la médecine, la psychiatrie semblerait nous offrir à son tour une disponibilité particulière pour une remise en cause radicale. Parce qu’elle est caractérisée par des limites estompées, par une pathologie et une clinique essentiellement variables et diverses, par le polymorphisme. Le psychiatre peut, en quelque sorte, guider les nouvelles orientations de la pensée médicale, maintenir l’élan pour une transformation radicale, et aider à définir une médecine plus sensible à des nécessités qui dépassent la seule élimination de la souffrance et des symptômes. Une médecine moins idéalisée certes, mais peut-être davantage prête à répondre à nos questions essentielles.