Une enquête et des rencontres au coeur de Calais.
Calais s’est développée par sa proximité avec l’Angleterre, qui définit son histoire depuis des siècles. Mais depuis les années 90, cette proximité la place irrémédiablement sur la route de l’exil chaque fois qu’un peuple est plongé dans la guerre. Kosovars, Irakiens, Syriens, Afghans, Érythréens, etc. Ce sont les bouleversements du monde qui s’échouent dans les dunes près du port. Et qui rythment désormais la vie de la ville au gré des démantèlements des jungles et des campements qui ne partent jamais vraiment. Pour comprendre la situation, Jessica Jouve est partie à la rencontre de ceux qui vivent la question migratoire au quotidien. Exilés, bénévoles, psychologues, avocats, CRS, tous livrent leur quotidien et leurs solutions face à une crise qui semble pourtant sans fin.
Découvrez, au travers de ces récits, analyses et rencontres, le quotidien de Calais et la parole de différents acteurs qui ont affronté la crise migratoire de ces dernières années.
EXTRAIT
Quelque chose d’autre m’inquiète énormément et a été accentué ces derniers temps. Quand nous, associatifs, faisons du contentieux, engageons des référés pour obliger l’administratif à se prononcer, l’État ment devant les tribunaux. Des préfets et des représentants de l’État vont dénier la réalité. Et une fois le verdict rendu, l’État ne va même pas respecter les décisions judiciaires. C’est arrivé encore récemment à la préfecture de Calais. Des personnes afghanes avaient été enfermées en centre de rétention, nous avons déposé un recours et la décision de renvoi vers l’Afghanistan a été cassée. Pourtant la préfecture est passée outre et a réaffirmé sa décision d’expulsion, que le tribunal administratif a également cassée. L’expulsion a tout de même été maintenue. Tout est permis maintenant : on est prêt à mentir et on ne respecte ni les besoins élémentaires ni les décisions judiciaires. Je ne sais pas comment expliquer cette toute-puissance des préfectures. Quand on discute avec le gouvernement, le Ministère, le cabinet, on nous récite simplement le discours classique de fermeté et d’humanité sans grande créativité.
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